Hadopi: il est interdit d'interdire

La nouvelle a déjà été commentée par de nombreux journaux et bloggueurs. Certains crient victoire (les internautes favorables à une licence globale dont j'ai déjà dit tout le mal que j'en pensais), d'autres sont atterrés (les artistes, les maison de disques et plus encore les producteurs de cinéma et de jeux vidéos).

Le Conseil Constitutionnel, saisi par les députés verts et PS, a validé certaines dispositions de la loi Hadopi et censuré d'autres. Je vous invite à lire la décision complète sur son site Internet. Il a notamment maintenu le principe selon lequel le titulaire de l'abonnement est responsable de la surveillance de sa connexion afin de s'assurer qu'elle n'est pas utilisée en violation du droit d'auteur. Mais il a invalidé la suspension d'abonnement à Internet pour les pirates, pour trois raisons:

  • la sanction est disproportionnée
  • Internet joue un rôle capital dans la liberté d'expression et de communication, la vie démocratique et la vie quotidienne
  • la coupure d'accès à Internet ne peut être prononcée que par un juge, pas par une autorité administrative (sur ce point-là la décision du Conseil est conforme au vote des députés européens).
On peut en conclure soit que Jacques Chirac et Jean-Louis Debré lisent le journal de Papageno (où j'avais exprimé mon hostilité à la coupure d'accès tout en étant favorable à d'éventuelles sanctions comme des amendes pour lutter contre le piratage), soit qu'ils ne sont pas complètement fâchés de faire un petit croche-patte à l'actuelle majorité présidentielle.

Que  va-t-il se passer maintenant ? Si l'on observe ce qui se passe ailleurs, aux États-Unis ou en Europe, voici ce qu'on peut raisonnablement prédire: les majors vont continuer de mourir, l'Hadopi verra sans doute le jour, avec un arsenal répressif plus réduit comprenant vraisemblablement des amendes, le piratage va baisser mais pas cesser, les artistes vont continuer à se faire exploiter par ceux qui vendent le produit de leur travail, les industries du jeu vidéo et du cinéma devront innover pour survivre (elles ont déjà commencé avec la 3D ou les plate-formes de téléchargement comme Steam). A moins bien sûr que crise climatique et crise économique ne se conjuguent pour plonger l'humanité dans un long déclin, auquel cas le droit d'auteur, tout comme le saxophone ou la forme sonate, ne subsisteront que comme vestiges d'une civilisation excessivement brillante et créative mais pour finir victime de ses propres excès.

Le sujet du piratage et le feuilleton législatif Hadopi commençant à me lasser, je consacrerai les prochains billets de catégorie Musique en Ligne aux meilleurs sites de musique en ligne, avec un premier article sur les sites de streaming et un autre sur les sites qui vendent des albums à l'unité. N'hésitez pas, chers lecteurs, à me communiquer le nom de vos sites préférés, et les raisons de votre amour pour eux, afin de compléter ma petite enquête.

Commentaires

1. Le vendredi 12 juin 2009, 18:26 par DavidLeMarrec

C'était couru d'avance : le projet d'amende automatique par Renaud Donnedieu de Vabres avait été repoussé pour partie pour des motifs comparables (notamment l'absence de débat contradictoire et le rapport spécifique des individus à l'Internet, dans une perspective un peu différente).

Par ailleurs, comme cette loi (quoique partant d'une bonne idée) était inappliquable (du moins sans se tromper...), qu'elle tombe tout de suite n'est pas une mauvaise nouvelle du tout, ça va obliger à remettre le sujet sur la table plus vite.

2. Le vendredi 12 juin 2009, 19:41 par Papageno

Le meilleur de l'histoire est tout de même la tête de Chirac sur la photo. C'est ce qui s'appelle jubiler en silence !

3. Le mardi 16 juin 2009, 14:11 par raphael

même des sommités mondiales sont contre hadopi !

http://blogs.lexpress.fr/attali/200...

et bim l'argument d'autorité !

4. Le mardi 16 juin 2009, 14:38 par Papageno

et bang !

http://www.lemonde.fr/culture/artic...