Le journal de papageno - Mot-clé - Johannes BrahmsLe Journal de Papageno est un blog francophone consacré à la musique classique et contemporaine.2023-08-18T08:55:10+02:00Patrick Loiseleururn:md5:e3d6f6e2ebef7c45d0c5e125b87d9f0aDotclearMozart, Brahms et Debussy par Axia Marinescuurn:md5:83a53c1883c33d5e9730fce64074451e2018-10-21T13:16:00+02:002018-10-21T20:16:18+02:00Patrick LoiseleurDisquesAxia MarinescudisqueFrédéric ChopinGeorges EnescoJohannes BrahmsLouis Moreau GottschalkpianorécitalWolfgang Amadeus Mozart<p>Les reporters du Journal de Papageno étaient au récital que donnait la pianiste Axia Marinescu à l'Institut Culturel Roumain de Paris pour célébrer la sortie de son premier disque, <a href="http://www.polymnie.net/pages/cds/introspections.html" hreflang="fr" title="Axia Marinescu Introspections Mozart Brahms Debussy piano"><em>Introspections</em> (label Polymnie)</a>. Compte-rendu croisé de ce beau disque et de cette belle soirée.</p> <p>Nos lectrices connaissent déjà <a href="https://www.journaldepapageno.fr/index.php/tag/Axia%20Marinescu" hreflang="fr" title="Axia Marinescu">Axia Marinescu</a>, jeune pianiste que nous aimons et qui donne ici son tout premier album en solo.</p>
<p>Le récital tout comme le disque commence par la Sonate en la majeur K 331 de Mozart. Musique transparente et ô combien délicate que beaucoup de pianistes redoutent car on y entend tout. On ne peut pas se reposer sur des basses enveloppantes ou une virtuosité spectaculaire pour impressionner l'auditeur. Il faut lui parler au coeur, avec des mots simples, avec cette merveilleuse vivacité d'esprit du divin Mozart. Axia Marinescu n'utilise presque pas de pédale dans cette sonate, juste la souplesse des doigts, la qualité du phrasé. Dans le finale 'Rondo Alla Turca' elle fait sonner son piano moderne un peu comme un pianoforte. Il ne manque que les cymbales que certains facteurs de pianoforte viennois avaient ajouté à leurs instruments, commandés par une pédale supplémentaire afin de donner une couleur orchestrale. Ce qui me plait dans cette sonate, c'est la naïveté presque enfantine de la pianiste qui semble compter sur son intuition pour la guider dans cette partition. Et ça marche ! On est sous le charme.</p>
<p>Changement d'atmosphère avec les <em>Intermezzi</em> opus 118 de <strong>Johannes Brahms</strong>, oeuvres de la maturité, empreintes d'une indicible et douce nostalgie. Dont les harmonies perpétuellement syncopées (en avance ou en retard sur les lignes mélodiques) finissent pas nous emmener au-delà du cadre tonal auquel Brahms était pourtant très fortement attaché. De très belles couleurs dans la version d'Axia Marinescu, qui est dépourvue de toute lourdeur. Cela nous permet de découvrir qu'on n'est pas obligé de jouer Johannes Brahms de façon exagérément "germanique", avec des tempi un peu trop lent, des basses un peu trop appuyées, des fortissimo un peu trop envahissants. La nuance, la subtilité, la délicatesse féminine sont autorisées dans cet opus 118... bonne nouvelle !</p>
<p><a href="https://www.journaldepapageno.fr/public/disques/Axia_Marinescu_Disque_Mozart_Brahms_Debussy.jpg" title="Axia_Marinescu_Disque_Mozart_Brahms_Debussy.jpg"><img src="https://www.journaldepapageno.fr/public/disques/.Axia_Marinescu_Disque_Mozart_Brahms_Debussy_m.jpg" alt="Axia_Marinescu_Disque_Mozart_Brahms_Debussy.jpg" style="margin: 0 auto; display: block;" /></a></p>
<p>Pour nous montrer que ses talents ne se limitent pas au programme du disque, Axia Marinescu nous gratifie de deux <em>Nocturnes</em> de <strong>Chopin</strong>, tout en délicatesse.</p>
<p>Puis viennent les <em>Images</em> de <strong>Claude Debussy,</strong> ma partie préférée du programme sans doute. Que dire sinon qu'on se régale de bout en bout, et que la sensibilité d'Axia Marinescu semble si magiquement accordée à celle du compositeur de Pelleas et Melisande, que l'on pourrait croire qu'elle improvise au lieu de jouer.</p>
<p>Pour clôturer le programme, l'<em>Alborada del gracioso </em>extraite des <em>Miroirs </em>de <strong>Ravel</strong>. Une espagnolade pleine de vie, de fantaisie, et de quintes parallèles... un véritable enchantement !</p>
<p>En bis, la pianiste roumaine nous gratifie d'une magnifique pièce d'Enesco, le <strong>Carillon Nocturne</strong>. Dont les sons de cloches me font un peu penser à Olivier Greif (ou encore à d'autres héritiers de l'impressionnisme comme Tristan Murail avec ses <em>Feuilles à travers les Cloches</em>, en réponse à Debussy, ou encore avec ses <em>Cloches d'Adieu</em>, en hommage à Messiaen). Voilà qui nous donne envie de l'entendre plus souvent dans le répertoire XXe / XXIe siècle. Pourquoi pas un deuxième album avec les compositeurs roumains depuis Enesco inclus ?</p>
<p>En second bis, une pièce du compositeur américain <strong>Gottschalk</strong>, <em>Souvenir de Porto Rico</em>, qui montre que le répertoire d'Axia Marinescu ne semble pas connaître de limites ni de frontières. Normal pour une citoyenne du monde qui parle 5 langues en plus de celle que tout le monde aime et comprend: la Musique.</p>Mozart, Brahms, Debussy par Axia Marinescuurn:md5:4d006a290f0a843c9a847901acc5b8fd2017-11-29T10:20:00+01:002017-11-29T10:23:45+01:00Patrick LoiseleurConcertsAxia MarinescuClaude DebussyJohannes BrahmspianoRobert SchumannrécitalWolfgang Amadeus Mozart<p> Nos lectrices qui ont une si grande culture et une si bonne mémoire se souviennent certainement de la pianiste <strong>Axia Marinescu</strong> dont nous avons parlé <a href="https://www.journaldepapageno.fr/index.php/post/2014/03/31/Axia-Marinescu-joue-Schubert%2C-Schumann%2C-Brahms">ici</a> et <a href="https://www.journaldepapageno.fr/index.php/post/2016/09/04/Piano%2C-piano%2C-piano%2C-piano%2C-piano%2C-piano%2C-piano%2C-piano%2C-piano%2C-piano%2C-piano%2C-piano%2C-piano%2C-piano%2C-piano%2C-piano%2C-piano%2C-piano%2C-piano%2C-piano%2C-piano-%21">là</a>, et qui a assuré la première audition de ma pièce <a href="https://www.journaldepapageno.fr/index.php/post/2014/03/15/L-Oiseleur%2C-Loilier%2C-Marinescu-chantent-Anna-de-Noailles-le-dimanche-16-mars-%C3%A0-Paris">J'ai tant rêvé par vous</a> avec L'Oiseleur des Longchamps et Aurélie Sabine Revault d'Allonnes. C'est toujours avec plaisir que nous retournons l'écouter, dans un programme plutôt classique mais choisi avec soin et exécuté avec une exquise sensibilité.</p> <p>Ça se passait à Sainte-Croix des Arméniens (au coeur de Paris) le 24 novembre dernier.</p>
<p>On commence par Mozart et la Sonate en la majeur K 331, celle qui se termine par la <span style="color: rgb(34, 34, 34); background-">célébrissime</span> Marche Turque que le gosse de votre voisin du dessus a certainement massacré pendant 6 mois, à votre grande exaspération. Replacée dans le contexte d'une sonate entière, avec ses mouvements lents et rapides, cette merveilleuse inventivité mozartienne qui nous surprend en permanence et nous émeut sans nous brusquer, il devient fort délectable, ce Rondo Alla'Turca.</p>
<p>Viennent ensuite les <em>Intermezzi op. 118</em> de Brahms. Musique de la maturité, d'un raffinement extrême tout en cherchant un certain dépouillement. Musique apaisée et méditative, sans aucune nostalgie pourtant, exécutée avec toute la délicatesse souhaitée par Axia Marinescu.</p>
<p><img src="https://www.journaldepapageno.fr/public/people/axia_marinescu_20171124.jpg" alt="" style="margin: 0 auto; display: block;" /></p>
<p>Et puis viennent les merveilleuses <em>Images</em> de Debussy (premier livre), une musique qui m'emballe beaucoup plus que celle de Brahms, allez savoir pourquoi. Le piano se fait orchestre, il nous emporte bien loin, comme un trois-mâts sur l'Atlantique.... </p>
<p>Et en dessert, une petite douceur avec les <em>Scènes d'Enfants </em>de Schumann.</p>
<p>Axia Maxinescu n'a pas seulement un sourire à faire pâlir d'envie Miss Roumanie, elle a aussi et surtout une grande sensibilité de musicienne, un jeu chaleureux et passionné qu'on apprécie encore plus si l'on ferme les yeux et qui font de chaque nouveau récital un moment charmant.</p>Une semaine en musiqueurn:md5:08de87922745a8b2153cd4ed2d63a7212017-02-04T17:26:00+01:002017-02-05T14:01:18+01:00Patrick LoiseleurConcertsAntonín DvořákconcertDaniel HardingimprovisationJohannes BrahmsLilia Boyadjevalori freedmanmarc ducretOrchestre de ParisPhilharmonieRaphaël MerlinRavelvincent royer<p>Chères lectrices, vous vous garderiez bien de m'en faire reproche, dans votre fidélité exemplaire, mais je ne le sens que trop bien que je vous néglige un peu ces derniers temps. Ce n'est pas que je n'ai pas assez à vous raconter: c'est plutôt qu'il y en a trop pour pouvoir les rapporter dignement dans ce journal. Essayons tout de même de résumer les concerts de la semaine dernière.</p> <p>Samedi nous avons commencé par un récital de la pianiste bulgare <strong>Lilia Boyadjeva</strong> qui donnait l'intégralité des <strong>Variations Goldberg</strong> de Jean-Sébastien Bach. C'était au <a href="http://www.ccbulgarie.com/" hreflang="fr">Centre culturel bulgare</a> dans le très chic 8e arrondissement de Paris. Peu de pianistes donnent les Variations Goldberg en concert car c'est une oeuvre terriblement exigeante: ces 30 variations résument tout l'art du clavier de Bach en alternant les variations contrapuntiques (dont les deux voix supérieures sont en canon à l'unisson, à la seconde, à la tierce, et ainsi de suite jusqu'à la neuvième) avec des variations de pure virtuosité claveciniste. Lorsqu'on les joue au piano, certaines variations écrites pour un instrument à deux claviers se révèlent particulièrement acrobatiques et nécessitent des croisements de mains et des superpositions diaboliques.</p>
<p><a href="https://www.journaldepapageno.fr/public/musiciens/lilia_boyadjeva_20170128.jpg"><img src="https://www.journaldepapageno.fr/public/musiciens/.lilia_boyadjeva_20170128_s.jpg" alt="" style="float: right; margin: 0 0 1em 1em;" /></a>Lilia Boyadjeva nous a livré une version énergique et vivante de ces variations. En assumant totalement le fait qu'elle les joue sur un piano moderne, elle n'hésite pas à donner une puissance et une ampleur toute symphoniques à certaines variations, ce qui est plutôt une bonne idée. La virtuose bulgare avale sans broncher les rafales de triples croches de certaines variations, mais c'est dans les variations lentes, en sol mineur, toutes en délicatesse, que son jeu me séduit le plus. Ce qui se glisse alors entre les notes ne peut s'expliquer avec des mots, mais ce n'est pas sans doute sans rapport avec la perte de sa fille Nathalie. On ne peut qu'être ému et admiratif devant la façon dont cette pianiste a décidé de transcender son deuil <a href="http://www.association-nathalie.com/index.php/fr/">en créant l'association "Nathalie"</a> qui fait vivre la mémoire de sa fille en organisant des évènements musicaux, des concerts et un concours international "de Bach au Jazz". C'est la réaction d'une artiste généreuse et pleine de vitalité devant un destin injuste.</p>
<p>Le même jour, on enchaîne avec de la musique de chambre au temple du Luxembourg: le <strong>quintette avec piano de Dvorak</strong> suivi du <strong>quatuor à cordes de Ravel</strong>. Joué par des amis, qui sont tous musiciens amateurs, ou plutôt passionnés car le terme "amateur" n'est pas assez fort pour qualifier leur travail non rémunéré. Le plaisir qu'ils ont à jouer ensemble, leur engagement sur chaque note, la complicité, la beauté du son, tout concourt à faire de ce récital un pur moment de bonheur.</p>
<p>Lundi, je suis fort triste car une répétition de quatuor est annulée pour cas de force majeure. Mais à quelque chose malheur est bon, car cela me donne la possibilité d'aller à la maison de la radio écouter mon ami <strong><a href="http://vincent-royer.com/">Vincent Royer</a></strong> en duo avec la clarinettiste québécoise <strong><a href="http://www.lorifreedman.com/">Lori Freedman</a></strong> dans <strong><a href="https://www.francemusique.fr/emissions/a-l-improviste">l'émission "À l'improviste" d'Anne Montaron</a></strong>. Pendant plus de trois quart d'heure les deux virtuoses travailleur le son avec tendresse et avec fureur. Ils explorent joyeusement toutes les possibilités sonores de l'alto et de la clarinette (une basse et une si bémol), y compris celles qui sont tellement folles qu'aucun compositeur n'a encore trouvé le moyen de les noter ou de les utiliser dans une pièce. Il y a vraiment une belle circulation d'énergie entre ces deux artistes. Deux ou trois spectateurs visiblement déconcertés par des sonorités aussi radicales quittent la salle, mais ceux qui restent écoutent avec une grande attention. Les ingénieurs de Radio France ont discrètement et très efficacement amplifié les deux instruments, ce qui se justifie compte tenu de la taille du studio et de leur propension à explorer des effets très subtils dans des nuances forcément pianissimo. En deuxième partie, c'est l'excellent <strong><a href="http://www.marcducret.com/">Marc Ducret</a></strong> en solo qui nous épate avec ses guitares électriques. En l'entendant je comprends que les guitariste de rock (y compris ceux du hard rock) n'utilisent que 10% de leur instrument. La diversité incroyable des sonorités qu'il fabrique en jouant sur toutes les caractéristiques de l'instrument est incroyable. Je me dis aussi que la voie de l'avenir pour les musiciens est à chercher sans doute davantage du côté de la lutherie électrique et électronique que du côté des instruments classiques dont les possibilités ont été explorées en long, en large et en travers.</p>
<p><a href="https://www.journaldepapageno.fr/public/musiciens/vincent_royer_lori_freedman_2017_01_30.jpg" title="vincent_royer_lori_freedman_2017_01_30.jpg"><img src="https://www.journaldepapageno.fr/public/musiciens/.vincent_royer_lori_freedman_2017_01_30_m.jpg" alt="vincent_royer_lori_freedman_2017_01_30.jpg" style="margin: 0 auto; display: block;" /></a></p>
<p>Mercredi nous travaillons le <strong>concerto pour violoncelle et orchestre de Dvorak</strong> avec <strong>Raphaël Merlin</strong> (violoncelliste du quatuor Ébène, entre autres) et l'orchestre <a href="http://www.ut5.fr/">Ut Cinquième</a>. En l'absence du chef d'orchestre, nous travaillons directement avec le soliste qui s'installe face à l'orchestre et nous dirige depuis son violoncelle. Personnellement, je ne suis pas un énorme fan de Dvorak, mais cela ne m'empêche pas de jouer de bon coeur ce concerto, et de profiter pleinement de l'énergie et l'enthousiasme communicatifs de Raphaël Merlin. Un pur bonheur !! Concerts prévus les 16, 18 et 19 mars prochains à Paris.</p>
<p><a href="https://www.journaldepapageno.fr/public/ut5/ut5_2017_03_en_preparation.jpg" title="ut5_2017_03_en_preparation.jpg"><img src="https://www.journaldepapageno.fr/public/ut5/.ut5_2017_03_en_preparation_m.jpg" alt="ut5_2017_03_en_preparation.jpg" title="ut5_2017_03_en_preparation.jpg, fév. 2017" style="margin: 0 auto; display: block;" /></a></p>
<p>Jeudi c'est à la Philharmonie de Paris que ça se passe avec un concert de l'<strong>Orchestre de Paris</strong>, dirigé par <strong>Daniel Harding</strong>. En première partie nous écoutons les <strong>Dances de la Terre (<em>Earth Dances</em>) d'Harrison Birtwistle</strong>. Cette grande fresque orchestrale a été parfois comparée au Sacre du Printemps, elle en a l'énergie rythmique. C'est du beau travail vraiment (je parle de la composition), avec une superposition complexe de plans sonores contrastés (une phrase mélodique très étirée dans une nuance piano peut être superposée avec deux ou trois autres beaucoup plus rapides et rythmiques). C'est atonal mais pas plus dissonant que n'importe quelle pièce de Bartok, Varèse ou Strawinwky justement. Bref c'est un classique du XXe siècle. Mais il y a un énorme problème avec les musiciens. Mis à part les cinq percussionnistes (huit si on compte le piano et les harpes) qui s'amusent comme des petits fous et profitent de leur rôle proéminent, les musiciens de l'orchestre de Paris sont d'une passivité et d'une mollesse incroyables. Ils jouent les notes, vu qu'ils sont sur scène et payés pour ça, mais rien de plus. Ils restent au fond de leur chaise, le nez dans la partition, attentifs au notes mais indifférents au reste de l'orchestre. Bien sûr, avec aussi peu d'engagement (et peut-être même une certaine hostilité sourde ?) le résultat sonore ne peut être que profondément ennuyeux, et il l'est. Mais n'importe quelle pièce le serait quand elle est jouée sans énergie, sans présence dans chaque note, chaque phrase mélodique ou rythmique. Même la Symphonie Fantastique ou l'Oiseau de Feu deviendraient un passeport pour l'ennui si elles étaient aussi mal jouées. Coincés dans une attitude passive-agressive et peut-être dans leurs préjugés sur la musique "moderne" ou "contemporaine", l'immense majorité des musiciens de l'orchestre de Paris semblent grincer des dents en attendant que le temps passe, et le public aussi pour le coup. Quel stupide gâchis ! Si c'est pour jouer comme ça, ils auraient mieux fait de rester chez eux, et nous aussi.</p>
<p>Après l'entracte, nous avons droit au premier concerto de <strong>Brahms</strong>, avec le pianiste <strong>Paul Lewis</strong> en soliste. L'interprétation est beaucoup plus convaincante. Les corps bougent avec la musique, accompagnant les gestes mélodiques et harmoniques, et les violonistes, même lorsqu'ils n'ont que deux notes à jouer, y mettent du coeur. De très belles couleurs à l'orchestre, notamment dans les nuances piano et pianissimo. Paul Lewis semble surmonter sans trop de mal les difficultés d'une partie virtuose et même athlétique par moments, tout en nous offrant beaucoup de délicatesse dans les passages plus calmes. Quant à Daniel Harding, très impliqué et énergique (davantage que dans le Birtwistle), il dirige les cordes notamment avec doigté et finesse, en restant attentif aux nombreux solo des instruments à vent (cor, hautbois, flûte). Une deuxième mi-temps tout à fait honorable et plaisante, mais qui ne m'empêchera pas de réclamer le remboursement de la moitié de mon billet pour la scandaleuse première partie.</p>Mendelssohn, Schubert, Brahms par Michèle Sharapan et ses amisurn:md5:a2c89fa471c2a909a41ecc60f1e601122015-07-01T16:36:00+02:002015-07-01T17:06:17+02:00Patrick LoiseleurConcertsFelix MendelssohnFranz SchubertJohannes Brahmsmusique allemandepianopiano 4 mainsromantismetrioviolonvioloncelle<p>Hier soir au théâtre du Conservatoire d'Art Dramatique dans le 9ième arrondissement de Paris. Une plaque indique que c'est dans cette salle qu'eut lieu la création de la <em>Symphonie Fantastique</em> d'Hector Berlioz, ainsi que celle d'<em>Harold en Italie</em>, excusez du peu. Le théâtre a été rénové depuis mais je me demande tout de même comment sa scène a pu accueillir un orchestre au complet avec les 2 harpes, les cloches, la grosse caisse, les 2 tubas et les 4 bassons, et <em>tutti quanti !</em></p>
<p>Quoi qu'il en soit cette salle est parfaitement adaptée au programme de trio avec piano et piano 4 mains proposé par Michèle Sharapan (piano), Thomas Gautier (violon), Seokwoo Yoon (violoncelle), et Grégory Ballesteros (piano). Avec de la musique romantique allemande (Mendelssohn, trio en ut mineur op 66), de la musique romantique allemande (Schubert, Divertimento à la hongroise D 818) et de la musique romantique allemande (Brahms, trio en si majeur op 8). Sans compter le bis, de la musique romantique allemande (Brahms, danse hongroise).</p> <p><img alt="Plaque_Berlioz.jpg" class="media" src="https://www.journaldepapageno.fr/public/affiches/.Plaque_Berlioz_m.jpg" style="margin: 0 auto; display: block;" title="Plaque_Berlioz.jpg, juil. 2015" /></p>
<p>Nonobstant ce flagrant manque d'orignalité dans le programme (nos lectrices savent combien à la rédaction du Jounal de Papageno, on aime les raretés, les chefs-d'oeuvres méconnus, le contemporain qui pique et qui gratte, les pastiches et les mélanges, bref, tout ce qui réveille les oreilles), je n'hésiterai pas à déclarer que j'ai passé un excellent moment. Quel beau concert ce fut !</p>
<p>On entend dès les premières notes qu'on a affaire à des musiciens confirmés et d'excellents chambristes, mais il y a quelque chose de plus. Quelque chose de magique dans l'air, qui circule entre les interprètes et le public. De l'amour. L'amour de la musique bien sûr (Brigitte François-Sappey dans son beau livre <em>La Musique de l'Allemagne Romantique</em>, nous rappelle avec raison qu'on ne trouvera jamais plus de pays ni de période historique où la musique ait été davantage chérie, célébrée et pratiquée par la société toute entière, poètes, écrivains ou banquiers), l'amour de tout le genre humain, et même davantage, car ce concert est organisé au profit d'un association (<a href="http://www.l214.com/" hreflang="fr">L214 Éthique et animaux</a>) que je soutiens et qui prône un plus grand respect de tous les êtres animés qui partagent cette petite planète avec nous. Quoi qu'il en soit ce trio de Mendelssohn est un régal de bout en bout. Et le quatre-mains de Schubert qui suit n'est pas moins réjouissant. Je me surprends à penser que le piano à quatre mains est peut-être la forme de musique de chambre qui réclame l'osmose la plus étroite entre les musiciens, qui sont proches au point de partager le même instrument ! Même les membres d'un quatuor à cordes n'atteignent pas ce degré d'intimité. Et ce divertimento all'ungherese me fait complètement craquer, <a href="https://youtu.be/QLE9Ur0Ix5w?t=16m41s" title="Franz Schubert Divertimento all'ungherese D. 818">surtout le troisième mouvement</a>.</p>
<p>A l'entracte quelques mots de Michèle Sharapan qui nous rappelle en deux phrases que si l'article L214 du Code Rural qui définit les animaux comme des <em>êtres sensibles</em> était réellement appliqué, il n'y aurait pas de corridas, ni de fourrure, ni d'élevages intensifs, ni de cirques ou de zoos. Puis on attaque le trio de Brahms. J'ai parfois l'impression d'être le seul être humain sur Terre à ne pas trop aimer la musique de Brahms, mais c'est pourtant le cas. J'ai toujours un peu d'étonnement en voyant les musiciens s'emparer avec passion de lignes mélodiques dans lesquelles je ne vois qu'un exercice de construction assez talentueux mais diablement académique. Et cet abus de tierces et de sixtes parallèles me reste sur l'estomac comme les 5 couches de crème d'une grosse part de <em>Strudel</em>. Cette petite réserve quant à l'oeuvre mise à part, je ne peux que reconnaître dans l'interprétation le même élan, la même chaleur, le enthousiame communicatif que dans le trio de Mendelssohn, et tout ça fait quand même drôlement du bien. Il me semble ausi que le public est plus attentif et chaleureux que d'habitude, même si je ne saurais dire combien il y a de militants et combien de mélomanes dans l'assistance. Les végétariens, plus sensibles que les autres au bien-être animal, le seraient-ils également à la musique ? Ce n'est pas impossible.</p>
<p>Après un petit bout de <em>Danse hongroise</em> arrangé pour piano 4 mains, violon et violoncelle en guise de bis, le concert se termine sur de chaleureux bravos. Et vous l'aurez compris, j'y ajoute les miens par écrit. Bravo, merci et à bientôt !</p>Récital de Mae Heydorn et Fériel Kaddour le 17 décembre 2008 à Parisurn:md5:ea0ab7c86f071d9d36b036e13fc9f5f02008-12-14T18:20:00+01:002017-05-19T08:40:05+02:00Patrick LoiseleurConcertsClaude DebussyFériel KaddourJohannes BrahmspianoReynaldo HahnRobert Schumannrécitalsoprano <p>Mae Heydorn, dont les lecteurs de ce journal ont déjà <a href="https://www.journaldepapageno.fr/index.php/post/2008/03/22/186-rappel-recital-schubert-schumann-brahms-samedi-22-mars-a-paris" hreflang="fr">entendu parler</a>, est une belle grande brune au timbre riche et légèrement cuivré, particulièrement à l'aise dans la musique romantique allemande. De plus elle a une prononciation parfaite dans cette langue car c'est sa langue <del>maternelle</del> paternelle (merci Eric :). Est-elle aussi convaincante dans la mélodie française (Debussy, Hahn) ? C'est ce que vous pourrez savoir si vous assistez au concert de mercredi prochain, dont je transmets l'invitation telle quelle:</p>
<hr />
<p>Bonjour à tous,</p>
<p>j'ai le plaisir de vous informer que la mezzo Mae Heydorn et moi-même donnerons un concert ce mercredi 17 décembre, à 20h30. Ma soeur Hinde Kaddour, comédienne, se joint à nous pour lire quelques poèmes.</p>
<p>Programme:</p>
<ul>
<li>Debussy: Chansons de Bilitis, Fêtes galantes (extraits)</li>
<li>Hahn: D'une prison, L'heure exquise</li>
<li>Schubert: An die musik, Die junge Nonne, An den Mond</li>
<li>Schumman: Die Lotosblume, Freisinn, Mein Herz ist schwer</li>
<li>Brahms: 3 Volklieder, Von ewiger Liebe</li>
</ul>
<p>Ce concert aura lieu à l'Eglise St-Marcel: 24 rue Pierre Nicole, 75 005 Paris. RER Port-Royal / bus 91-38. Entrée: 10 euros (tarif réduit: 8 euros).</p>
<p>Vous trouverez l'affiche du concert en fichier joint de ce mail.
Nous serons toutes les trois très heureuses de vous y retrouver!</p>
<p>Bien à vous,
Fériel Kaddour</p>
<hr />Brahms par le duo Thorette-Farjoturn:md5:01dc166980832104f036203a8b590aa92008-04-09T21:22:00+00:002017-05-05T15:16:16+00:00Patrick LoiseleurDisquesaltodisqueJohannes Brahmspianovioloncelle<p>J'avais déjà parlé de leur <a href="https://www.journaldepapageno.fr/index.php/2007/08/30/73-disque-tenebrae-par-arnaud-thorette-et-johan-farjot" hreflang="fr">premier disque</a>, consacré essentiellement à la musique française du XXIe siècle. Arnaud Thorette (altiste) et Johan Farjot (pianiste), qui ont constitué un duo en 2000, nous proposent un autre album, consacré à Brahms.</p> <p>Sur deux disques, on a les deux sonates opus 120, ainsi que les deux <em>lieder</em> de l'opus 91 (avec la mezzo Karine Deshayes), mais aussi le trio opus 114 (avec le violoncelliste Raphaël Merlin).</p>
<p>Globalement c'est un enregistrement très soigné, réalisé avec autant de passion que de professionnalisme. Je ne suis pas un grand fanatique des comparaisons discographiques, mais il m'a semblé que l'enregistrement de Thorette et Farjot n'a rien à envier à celui de Yuri Bashmet et Mikhaïl Muntian, que j'ai ré-écouté pour l'occasion. Thorette et Farjot jouent ensemble depuis des années, ils forment un vrai duo et cela s'entend. La cohésion est remarquable, et lorsqu'une phrase passe d'un instrument à l'autre, c'est avec une totale continuité. Je vous propose d'écouter le début du mouvement lent de la 1e sonate, dont j'aime le caractère rêveur et les harmonies un peu suspendues (assez inhabituelles chez Brahms)</p>
<p align="center">
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</p>
<p>Ces sonates sont une des pierres de touche du répertoire pour alto et piano (qui n'est pas très abondant en ce qui concerne la période romantique) et elles ont été gravées par les plus grands altistes, de William Primrose à Kim Kashkashian. C'est donc un vrai défi qui demande une certaine maturité autant qu'une bonne technique.</p>
<p><img src="https://www.journaldepapageno.fr/images/brahms thorette farjot.jpg" alt="Brahms Thorette Farjot" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p>C'est un projet que ces deux artistes tenaient beaucoup à cur. Lorsque j'avais avoué à Arnaud Thorette que je gardais une préférence pour la version avec clarinette de ces sonates, il s'est défendu avec énergie:</p>
<blockquote><p><em>Vous savez, les sonates de Brahms sont des vraies sonates pour alto. Brahms les a transcrites lui-même (choix des tessitures, ajouts de doubles cordes, changements de notes...). S'il n'avait pas voulu qu'on puisse les jouer avec bonheur à l'alto il ne l'aurait pas fait... En tout cas c'est mon opinion sur cette question qui revient souvent et qui a même retardé la décision de réaliser ce disque car je savais que cette remarque reviendrai forcément dans le débat des critiques! Il y a la même question avec le trio en la mineur que vous trouverez sur ce disque. A mon sens, il ne faut pas chercher à comparer ces deux versions car le changement d'instrument fait que pour moi ça n'est plus la même musique.</em></p></blockquote>
<p>Concernant le trio op 114 je garde un petit regret car le remplacement de la clarinette par l'alto le transforme en un trio avec piano <q>ordinaire</q> (un peu comme si Brahms avait écrit un quatrième trio avec piano, le violon étant remplacé par l'alto). On perd le mariage des trois timbres qu'on a dans la version piano-violoncelle-clarinette. Même si ça serait plus osé car ça n'a pas été prévu ainsi par le compositeur, remplacer le violoncelle par l'alto et conserver la clarinette dans le trio op 114 conserve davantage le charme et la spécificité cette uvre.</p>
<p>Quant aux <em>lieder</em> de l'opus 91, ils constituent peut-être le meilleur moment de cet album. Voici le texte du premier (Rückert), évoquant la lumière du crépuscule et les sentiments qu'elle inspire</p>
<blockquote><p><strong>Gestillte Sehnsucht</strong></p></blockquote>
<p></p>
<blockquote><p>In gold'nen Abendschein getauchet,<br />
Wie feierlich die Wälder stehn !<br />
In leise Stimmen der Vöglein hauchet<br />
Des Abendwindes leises Weh'n.<br />
Was lispeln die Winde, die Vögelein ?<br />
Sie lispeln die Welt in Schlummer ein.<br /></p></blockquote>
<p></p>
<blockquote><p>Ihr Wünsche, die ihr stets euch reget<br />
Im Herzen sonder Rast und Ruh !<br />
Du Sehnen, das die Brust beweget,<br />
Wann ruhest du, wann schlummerst du ?<br />
Beim Lispeln der Winde, der Vögelein,<br />
Ihr sehnenden Wünsche, wann schlaft ihr ein ?<br /></p></blockquote>
<p></p>
<blockquote><p>Was kommt gezogen auf Traumesflügeln ?<br />
Was weht mich an so bang, so hold ?<br />
Es kommt gezogen von fernen Hügeln,<br />
Es kommt auf bebendem Sonnengold.<br />
Wohl lispeln die Winde, die Vögelein,<br />
Das Sehnen, das Sehnen, es schläft nicht ein.<br /></p></blockquote>
<p></p>
<blockquote><p>Ach, wenn nicht mehr in gold'ne Fernen<br />
Mein Geist auf Traumgefieder eilt,<br />
Nicht mehr an ewig fernen Sternen<br />
Mit sehnendem Blick mein Auge weilt;<br />
Dann lispeln die Winde, die Vögelein<br />
Mit meinem Sehnen mein Leben ein.<br /></p></blockquote>
<p>(Je ne fournis pas de traduction, vous n'aviez qu'à pas lancer des boulettes de papier mâché en cours d'Allemand seconde langue, bande de cancres !)</p>
<p>Le dialogue entre la voix et le plus délicat des instruments à cordes donne tout simplement des frissons. Le seul problème quand j'entends une belle mezzo, c'est que j'ai envie de l'épouser sur-le-champ. Pourtant en général ça ne se fait pas comme ça: on ne peut pas capturer ni posséder la beauté. On la contemple, c'est tout.</p>
<p>Dernier point avant d'aller au dodo: si vous souhaitez entendre ces sonates en concert, par les mêmes interprètes, je vous invite à consulter <a href="http://www.johanfarjot.com/concertsa.html#avril_juin_2008" hreflang="fr">l'agenda d'Arnaud Thorette</a>.</p>