Le journal de papageno - Mot-clé - musique spectraleLe Journal de Papageno est un blog francophone consacré à la musique classique et contemporaine.2023-08-18T08:55:10+02:00Patrick Loiseleururn:md5:e3d6f6e2ebef7c45d0c5e125b87d9f0aDotclearDanse de la joie des étoilesurn:md5:23f178a5d489472f1a7eeb717c9efe9b2015-05-03T14:45:00+02:002015-05-03T16:11:20+02:00Patrick LoiseleurCompositionsaltoColognecréationfestivalmusique contemporainemusique de chambremusique spectraleVincent Royer<p><em>Danse de la joie des étoiles</em> est la deuxième partie de ma pièce pour 13 altos, écrite durant l'été 2012. C'était une période singulère de ma vie, où j'ai vu s'effondrer à peu près tout ce que j'avais essayé de construire, tout ce qui m'était cher. En bon gaulois je ne craignais rien sauf que le ciel me tombe sur la tête et c'est précisément ce qui est arrivé à ce moment-là.</p>
<p>Faute de pouvoir trouver du réconfort dans mon entourage, c'est en moi-même que j'ai dû creuser pour trouver de nouvelles ressources. Ce que j'y ai trouvé, à mon grand étonnement ? De la joie. Une joie surabondante et inépuisable. </p> <p>C'est cette joie inexplicable que j'ai cherché à traduire par la musique, dans un morceau qui occupe la place centrale de <em>13.2 milliards d'années-lumière, </em>ma grande pièce pour 13 altos. Ce mouvement rapide et dansant est encadré par deux mouvements plus lents et méditatifs (que j'ai intitulé <em>Singularité Initiale</em> et <em>Contemplation du Vide</em>). L'alto solo, ici magnifiquement incarné par Vincent Royer, lance des appels joyeux par des motifs courts qui sont repris et développés par les douze autre altos. L'enchevêtrement serrés de ces motifs crée des <em>textures micro-polyphoniques</em> comme on peut en trouver chez Ligeti. Ces gros mots cachent un principe simple: prenez un motif de 6 notes, confiez-le le à 6 instruments, chacun étant décalé d'une note par rapport au précédent. Le résultat est un accord répété de 6 notes dont la texture est vivante et vibrante, surtout en concert, avec la spatialisation. Voici l'idée de base, on peut ensuite travailler ces textures comme le boulanger travaille la pâte. Et bien entendu, combiner ces textures avec des lignes mélodiques ou des personnages rythmiques pour donner vie et forme à l'ensemble.</p>
<p>La joie est contagieuse et irrépressible, c'est ce que j'ai ressenti en écrivant cette pièce, mais également le jour de la création publique. Vincent Royer et ses camarades du pupitre d'alto du Gürzenich Orchesters Köln avaient dédié le concert du 26 avril 2014 à leur camarade Christoph qui avait disparu quelques moi auparavant suite à une grave maladie. Au-delà même de la tristesse et de la conscience aigüe d'une perte irréparable, j'ai senti entre eux durant tout ce concert une énergie, un élan, un enthousiasme qui étaient certainement le plus bel hommage qu'on puisse rendre à un artiste et à un ami. C'est assez sensible même dans la vidéo qui est comme une carte postale chère à mon coeur.</p>
<p>Ce qu'on trouve au fond du ciel le plus noir, ce sont des étoiles. Et si l'on fait silence, on les entend danser. Alors dansons, mes amis ! La vie est courte et le chagrin nous tuera bientôt. Tant que nous sommes vivants, il est urgent de crier notre joie.</p>
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</p>Sound of Stockholm par l'itinéraireurn:md5:ee7740bfd4f98615b67ec0da3fc80f3c2015-02-02T17:39:00+01:002015-02-06T17:34:36+01:00Patrick LoiseleurConcertscréationfestivalGriseyl itinérairemusique contemporainemusique spectralemusique électroniquepercussionpianopolitiqueviolon<p>Ouï au conservatoire Claude Debussy du 17e arrondissement le 23 janvier dernier, le programme<em> Sound of Stockholm</em> de <a href="http://litineraire.fr/">l'itinéraire</a>. Un ensemble qui réalise un travail fantastique avec des moyens matériels sans commune avec d'autre formations comme l'inter-contemporain pour ne pas le citer.</p>
<p>Comme son nom l'indique, ce programme a été composé pour le festival <a href="http://soundofstockholm.se/en/" hreflang="en">Sound of Stockholm</a> comme un mille-feuilles alternant des créations et des pièces plus ``classiques'' de Grisey, Scelsi et Leroux.</p> <p>On commence par <em>Talea </em>de Gérard Grisey, une fort belle pièce écrite pour le même effectif que le <em>Pierrot Lunaire</em> (piano, violon, violoncelle, flûte, clarinette), et dans laquelle j'apperçois pour la première fois chez Grisey une certaine parenté avec Boulez, notamment dans l'alternance de gestes instrumentaux virtuoses et parfois violents et de longues tenues pianissimo, atones.</p>
<p>Ensuite viennent les<em> Points caractéristiques</em> de Joakim Sandgren, une pièce avec électro-acoustique que je trouve fort intéressante dans les 3 premières minutes et un peu longue ensuite. La clarinette et le violoncelle sont utilisées uniquement comme des instruments de percussion, produisant des souffles inharmoniques qui se mêlent aux sonorités de la bande. Le tout est bien travaillé mais ne se renouvelle pas suffisamment sur la durée de la pièce.</p>
<p><em>Night Music</em> de Djuro Zivkovic est une série de miniatures charmantes, fort bien instrumentées, volontiers consonnantes ou mélodiques sans être néo- ou rétro- pour autant. Une jolie réussite.</p>
<p><em>AAA</em> de Philippe Leroux témoigne d'une réelle maîtrise. C'est nous dit la notice une sorte d'arrangment créatif d'une pièce d'abord conçue pour électronique seule. Des motifs répétés servent à créer de la tension, accumuler de l'énergie jusqu'à des ruptures savamment construites.</p>
<p>On entend également deux pièces pour violon solo: </p>
<p>- <em>L'âme ouverte</em> de Giacinto Scelsi. Ecrite en 1973, cette pièce utilise essentiellement des doubles cordes avec des micro-intervalles. Passionnant si on l'écoute comme tel, un peu aride peut-être pour des oreilles peu accoutumées à la dissonance. En tout cas on sait où Michael Levinas est allé pêcher des idées pour ses <a href="https://www.journaldepapageno.fr/index.php/post/2007/09/08/80-disques-les-lettres-enlacees">lettres enlacées</a> !</p>
<p>- <em>...et ainsi, ou, au-delà du chant...</em> de Tetsuji Emura, une belle pièce qui me fait un penser à Takemistu par ses aspects méditatifs.</p>
<p>Pour compléter ce beau programme, les artistes de l'itinéraire nous ont proposé des lectures de textes de Grisey et Tarkovsky entre les morceaux, pendant les changements de plateau. Leur façon à eux de nous rappeler qu'en ces périodes troublées, marquées par une violence politique qu'on croyait révolue, et toutes les violence verbales qui viennent dans son sillage, l'art est plus que jamais une nécessité vitale.</p>La musique des étoilesurn:md5:f12a59d37dbb56b8c75489bf721dd8062008-10-27T23:39:00+01:002017-05-14T12:11:49+02:00Patrick LoiseleurRépertoireastronomieGérard Griseymusique spectrale<p>Lu dans <a href="http://news.bbc.co.uk/2/hi/science/nature/7687286.stm" hreflang="fr">BBC News</a>, un article sur le son produit par les étoiles, enregistré par le radio-télescope COROT, envoyé dans l'espace il y a dix-huit mois. Vous pouvez consulter le site de l'<a href="http://www.lesia.obspm.fr/astro/sismo/pages/savoirplus.html#outil" hreflang="fr">observatoire de Paris pour plus de détails</a>, mais en gros, COROT permet de mesurer les ondes acoustiques ou gravitationnelles émises par les étoiles et d'en tracer le spectre. En ayant pris soin de recaler les fréquences dans la zone où notre oreille est sensible, on peut ainsi <q>écouter</q> les étoiles.</p> <p><img src="https://www.journaldepapageno.fr/public/images/nuit_etoilee.jpg" alt="nuit_etoilee.jpg" style="display:table; margin:0 auto;" title="Nuit étoilée Van Gogh" /></p>
<p>A quoi ressemble le son d'une étoile ? à une composition de Gérard Grisey: un son complexe, inharmonique, à la fois immobile et animé de battements. Comme le bruit de la mer ou du vent ou d'une cascade, c'est apparemment répétitif mais si on écoute bien en détail on perçoit beaucoup de micro-mouvements qui font que le son, bien qu'uniforme en apparence, ne lasse pas l'oreille. En bref c'est encore plus fascinant qu'un aquarium rempli de poisson rouges ou qu'une soirée de variétés sur TF1: le son des étoiles, ce vide rempli de petits rien, a quelque chose de profondément addictif.</p>
<p>Si j'ai cité Gérard Grisey ça n'est pas tout à fait par hasard car dans <em>Le noir de l'étoile</em>, une de ses dernières oeuvres, le compositeur français a utilisé le son d'un pulsar, dans une pièce pour 6 percussionnistes dédiée aux Percussion de Strasbourg. Il est même prévu, dans la version de concert, qui comporte une véritable scénographie, que le son du pulsar soit capté en direct par un radiotélescope, et non simplement re-joué d'après un enregistrement. Ce qui fait du pulsar P 0359-54 un véritable interprète ! Imaginons un instant que l'étoile morte fasse des siennes, qu'une collision cosmique inattendue cause un couac retentissant...</p>Journée Tristan Murail le 14 décembre au CMDCurn:md5:d51ff14b73e1865e3b05f7ff7f8ce6432007-12-02T12:36:00+00:002017-05-04T16:16:45+00:00Patrick LoiseleurConcertsmusique spectraleTristan Murail<p>Une<a href="http://www.cdmc.asso.fr/?q=fr/saison_cdmc/journees_thematiques/tristan_murail" hreflang="fr"> journée de conférences</a> et surtout un concert à 18 heures seront consacrées le 14 décembre prochain par le <a href="http://www.cdmc.asso.fr" hreflang="fr">CMDC</a> au chef de file de l'école spectrale, Tristan Murail. Qu'est-ce que la musique spectrale ? pour faire très bref, disons que c'est un ensemble de techniques d'écritures qui prend le spectre (c'est à dire la décomposition d'un son musical en partiels de forme sinusoïdale grâce à la transformation de Fourier) comme point de départ.</p> <p><img src="https://www.journaldepapageno.fr/images/Murail Winter Fragments.jpg" alt="Tristan Murail: Winter Fragments" style="display:table; margin:0 auto;" /></p>
<p>D'une certaine manière la musique spectrale est un retour aux sources car les règles de l'harmonie classique sont elles aussi fondées sur les propriétés du spectre, dont certaines connues depuis l'antiquité (par exemple si deux violons jouent à la quinte, grâve au rapport 3/2 qui existe entre les fréquences fondamentales, de nombreux partiels vont coïncider, ce qui crée une sensation de consonnance). C'est aussi l'utilisation de l'ordinateur, soit pour analyser le son, soit pour créer de nouveaux sons. Dans le cas de Tristan Murail enfin, c'est une musique qui puise largement dans la nature des sources d'inspiration.</p>
<p>Si vous ne connaissez pas du tout Murail, je vous recommande d'écouter <em>Gondwana</em> ou bien <em>Winter Fragments</em> (disponibles en disque ou en téléchargement).</p>