Les nouveaux castrats

Il n'est un mystère pour personne que nous vivons une époque éminemment castratrice. On pourrait faire de longs développements sur la question, mais je me contenterai de vous rappeler ces petits messages dont on nous bombarde le cerveau en permanence: pour votre santé évitez de grignoter - nous vous rappelons qu'il est interdit de fumer dans l'ensemble de la gare - pour votre sécurité, contrôles automatiques - l'abus d'alcool est dangereux pour la santé - à consommer avec modération. Comme si la société était devenu une mère trop envahissante avec ses conseil forcément bons mais trop nombreux et par là même castrateurs.

En voulez-vous une nouvelle preuve ? dénichée dans une maternelle, une version modernisée du petit chaperon rouge (il faudra que j'en retrouve les références exactes): le loup se fait d'abord taper dessus par le petit chaperon rouge, puis chasser par la grand-mère, en bref tout le monde se moque de lui et il ne fait peur à personne. Difficile de savoir à quel point l'auteur(e) en est consciente, mais cette fable raconte quelque chose sur notre monde.

Dans ce contexte, rien d'étonnant à ce que les voix masculines dans le registre féminin - haute-contre ou contre-ténor, ne me demandez pas la différence - reviennent à la mode. En surfant notamment sur la vague du baroque, dont le film Farinelli en 1994 fut un des jalons les plus visibles au grand public:

Fort heureusement avec les progrès de la chimie (ou de la technique vocale ?), on n'a plus besoin de recourir à la chirurgie pour produire ces voix étranges dont le timbre garde incompréhensiblement une espèce de résistance, un élément masculin inexpugnable. Un peu comme le timbre du violoncelle dans l'aigu: s'il peut être très beau, il conserve par rapport à celui du violon dans le même registre une épaisseur, une densité qui font à la fois son charme et ses limites.

Pour ma part, si j'ai eu la chance d'entendre de très belles voix masculines dans tous les registres (de basse à soprano), c'est aux voix féminines que je dois mes plus belles, mes plus grandes, mes plus profondes émotions lyriques. Sur la scène comme dans la vie, j'aime les femmes avant tout !

Commentaires

1. Le mercredi 15 octobre 2008, 10:21 par DavidLeMarrec

Il est vrai que les voix de femme semblent (et sont) plus libres, plus ductiles, plus sonores.

Les contre-ténors, sinon, ne sont absolument pas comparables aux castrats d'antan, qui étaient précisément beaucoup plus ductiles et puissants.

C'est simplement qu'il utilisent l'émission en voix de tête au lieu du mécanisme lourd de la voix.

Donc les vraies voix de castrat, il n'en existe plus.

Pardon pour la promo éhontée, mais plutôt qu'un long développement :
http://operacritiques.free.fr/css/i... .

Pour ma part, toutes les voix peuvent me transporter d'égale force, ça dépend véritablement de la manière.