La quatrième symphonie de Jean Sibelius (deuxième partie)

Continuons notre exploration de cette partition majeure avec le second mouvement, à 3/4 indiqué "Allegro molto vivace". Il débute par un solo de hautbois, accompagné des seuls altos, utilisant une technique de "tuilage" très fréquente chez Sibelius:

exemple 5

En apparence, la tonalité de fa majeur, la légèreté de l'orchestration, tout indique un climat plus détendu que dans le premier mouvement. Mais l'intervalle de triton (qui joue un rôle central dans cet oeuvre) reste présent: d'abord quelques si bécarre se glissent dans les phrases du hautbois et des violons (triton fa-si), et donnent une coloration un peu étrange et inquiétante à ce fa majeur. Plus loin, mesure 29, les violons et le hautbois s'échangent un motif constitué uniquement de tritons:

exemple 6

Il y a comme une contradiction entre l'aspect aimable et primesautier de cet échange, et les harmonies plutôt acides qui le sous-tendent. Est-ce une tentative du compositeur pour apprivoiser les dissonances tellement à la mode chez les autres musiciens dans les années 1900-1910 ? Une sorte d'ironie tendant à tourner en dérision l'activité même du musicien (jouer, écrire de la musique) ? Quoi qu'il en soit, loin de rassurer l'auditeur éprouvé par la charge émotionnelle du premier mouvement, ce scherzo entretient une espèce de malaise dans l'attente du mouvement lent qui suit, véritable coeur de la symphonie, et qui sera l'objet de mon prochain billet.