Morton Feldman: the viola in my life

Les vacances sont parfois l'occasion de déchirer l'emballage plastique de disques qu'on a empilés pendant l'année sans trouver le temps de les écouter. Aujourdhui, je vous propose: The viola in my life de Morton Feldman, disque qui comporte plusieurs pièces instrumentales, interprétées ou dirigées par le compositeur:

  • The viola in my life pour alto soliste, violon, violoncelle, piano, flûte, clarinette, percussions
  • False Relatioships pour violon, violoncelle, deux pianos, trombone, percussions
  • Why Patterns ? pour flute, piano et percussions

Feldman the viola in my life

Grand ami de John Cage, Morton Feldman (1926-1987) a exploré dans les années 1950 plusieurs formes d'écriture indéterminée ou stochastique si l'on veut: selon les partitions, soit les hauteurs, soit le rythme, soit d'autres paramètres sont laissés à l'appréciation des interprètes. Du coup, il est un peu difficile de juger ses pièces d'après un disque Feldman, car il faudrait les entendre plusieurs fois, dans des version différentes, pour séparer ce qui est écrit de ce qui ne l'est pas.

Comment écrire de la musique sans barres de mesures, sans pulsation, sans points d'appuis pour les musiciens ? Plusieurs techniques permettent de le faire sans que ça ressemble à n'importe quoi:

  • harmonies statiques: chaque instrument se restreint à un ou plusieurs groupes de notes ayant chacun une couleur harmonique bien identifiable. On peut alors combiner les couleurs de manière aléatoire
  • registre différents: en attribuant une plage de notes à chaque instrument, on peut éviter les clashs venant des consonances ou dissonances trop nettes
  • lignes mélodiques basées sur des motifs répétitifs (c'est particulièrement net dans la pièce Why patterns ? pour flute, percussions et piano)

A l'oreille, la musique de Feldman est lente, constamment dans le registre piano, un brin répétitive, souvent aux limites du silence. Une musique qui contrairement à toutes les autres ou presque ne joue pas sur les contrastes, sur le développement d'un discours, sur les ruptures dramatiques. Aucun caractère systématique non plus chez ce musicien qui semble avoir été très peu tenté par les sirènes du sérialisme. De belles lignes mélodiques (à l'alto notamment pour the viola in my life), beaucoup de détails qu'on écoute avec grand plaisir mais comme une vague sensation d'ennui au bout d'un petit moment...