Amoyel l'enchanteur

Ayant vu et beaucoup apprécié son spectacle Le pianiste au 50 doigts, hommage à son maître György Cziffra, ainsi que ses enregistrements des sonates d'Olivier Greif, c'est avec grand plaisir que j'ai d'écouter le nouveau récital de Pascal Amoyel intitulé: le jour où j'ai rencontré Franz Liszt, au théâtre du Ranelagh à Paris.

Avec une naïveté et une bonhommie désarmantes, Pascal Amoyel nous raconte son Liszt. Et le récit de la rencontre avec celui qui fut le professeur du professeur de son professeur devient une rencontre intime et vibrante avec le public. Avec une pointe d'humour (Amoyel parvient à nous faire rire sans la moindre vulgarité, et rien que pour ça on devrait recommander son spectacle à tous les enfants de 7 à 107 ans), le pianiste français nous conte ses premiers émois ; le récit de son enfance se mêle à celle du petit prodige hongrois qu'on ne pouvait comparer qu'à Mozart tant son talent précoce forcait l'admiration.  

amoyel_liszt.jpeg

Dans ce beau théâtre tout en bois du Ranelagh, grâce à l'enthousiasme de l'interptète, un minimum d'accessoires et de lumières suffit à nous transporter, à nous faire voyager dans l'Europe de ce début de XIXè siècle. On imagine ainsi le tout jeune Liszt se produisant devant la famille Esterházy, prenant des leçons avec Carl Czerny. On redécouvre avec lui Bach, Mozart et Beethoven. On l'imagine à peine sorti de l'adolescence, donnant des leçons de piano à de riches Parisiennes pour gagner sa vie après le décès de son père, éconduit par la famille de certaine d'entre elles qu'il demanda en mariage. On rêve à son amitié féconde avec Chopin. Tout en évoquant la carrière du virtuose hongrois, Amoyel, en bon pédagogue, nous rappelle également, exemples musicaux à l'appui, combien la musique de Liszt était tourné vers l'avenir, et comment elle annonce déjà Wagner, Ravel, Schönberg ou Rachmaninoff. Ce beau récital atteint son apothéose avec la Légende de Saint François de Paule marchant sur les flots suivi par la transcription de la Mort d'Isolde de Richard Wagner, avant de se conclure sur le magnifique Wiegenlied, une pièce dépouillée écrite par Liszt dans ses toutes dernières années (quelles modulations incroyables et quelle maîtrise de l'écriture malgré cette apparente simplicité !), qui permet de boucler la boucle sur le thème de l'enfance.

Comme il nous l'avouera, lorsqu'il était enfant, Pascal Amoyel rêvait de devenir magicien: devenu musicien et même prestidigitateur (eu egard à la prestesse de ses doigts), il a parfaitement réussi à nous enchanter. Et plus encore, à nous émouvoir par sa sincérité. Bravo !

À lire également: le compte-rendu de Nomad Music.