Olivier Greif: Sonate de Requiem pour violoncelle et piano

Le répertoire pour violoncelle et piano est incontestablement plus réduit que celui qui existe pour violon et piano. Il comporte néanmoins de purs joyaux qui font la joie des violoncellistes et la nôtre. Et pour peu qu'on n'hésite pas à recourir à des transcriptions et à s'aventurer hors des sentiers battus, il n'est finalement pas si mince que cela.

On trouve sur Wikipedia une liste d'oeuvres pour violoncelle divisée en trois sections: violoncelle seul, violoncelle et piano, violoncelle et orchestre. J'y ai d'ailleurs modestement contribué en ajoutant quelques pièces qui manquaient comme la sonate d'Alkan ou les élégies de Franz Liszt.

Olivier Greif: Sonate de Requiem

Ma dernière découverte en date est la Sonate de Requiem pour violoncelle et piano d'Olivier Greif (un compositeur disparu en 2000 il y a quelques années). Comme son nom l'indique, elle est d'inspiration plutôt sombre. Le violoncelle énonce dès le début un motif de tierce mineure descendantes (si bémol - sol) qui servira de fil conducteur à l'ensemble de la sonate. Dans le premier mouvement (Molto Lento), qui oscille entre ré mineur et fa mineur, à la complainte du violoncelle répond le piano dans l'extrême aigu, qui sonne comme une boîte à musique un peu désaccordée. Puis la tension explose dans une deuxième section Allegro (mais toujours basée une la tierce mineure descendante fa - ré). Le mouvement se termine sur des appels véhéments du violoncelle, qui ne trouvent comme réponse que la résonance de puissants accords du piano, puis finalement le silence.

Le deuxième mouvement est un Notturno qui lui aussi s'ouvre sur une tierce descendante (ré bémol - si bémol) puis permet au violoncelle de chanter, dans un atmosphère toujours sombre mais un peu apaisée. Une sorte de chaconne se développe sur un beau thème en ré bémol mineur qui semble comme indifférent aux dissonances introduites par le piano sur les contre-temps. La dernière variation nous fait entendre ce thème dans l'aigu assourdi du piano sur un accompagnement de trémolos sul ponticello du violoncelle.

Suit un Presto vivo d'une grande violence, harmonisé assez nettement en ré mineur, et toujours basé sur la tierce mineure ré-fa. Mais cette énergie finit par s'épuiser et c'est par un mouvement lent Quasi Cadenza, dans la nuance piano et pour l'essentiel dans le grave (on oscille entre si mineur et si majeur), que se conclut cette belle sonate. Les deux dernières notes rejoignent les premières (une tierce mineure mi bémol - do, mais j'ai l'impression de radoter !).

L'écriture de piano, massive et saturée dans les graves, fait penser à celle de Rachmaninoff (tout comme l'ambiance générale de cette sonate et l'abus des tonalités mineures), mais l'harmonie et techniques d'écriture situent cette sonate sans ambiguïté dans la seconde moitié du XXè siècle. Par la solidité de sa construction, l'unité des mouvements, la beauté des thèmes et son grand pouvoir expressif, elle mérite sa place dans le répertoire. Par ailleurs elle n'utilise que les ressources les plus nobles de l'instrument, à l'inverse de nombre de pièces contemporaines qui semblent se limiter aux modes de jeu exotiques (sul ponticello, col legno, etc), ce qui est agaçant et stérile.

Cette sonate figure sur un disque d'Emmanuelle Bertrand et Pascal Amoyel, deux virtuoses irréprochables que je n'ai jamais entendu en concert, mais dont j'ai un autre disque avec la sonate d'Alkan qui tout à fait remarquable. Ce disque comporte également le trio avec piano du même compositeur, dont l'inspiration comme la technique se rapprochent beaucoup de la Sonate (je publierai peut-être une analyse plus détaillée de ce trio dans un prochain billet).

Commentaires

1. Le mardi 26 février 2008, 14:11 par klari

Dans un autre genre, j'étais tombée sur un très beau podcast de la WNYC, à propos de la composition par David Lang d'une pièce (2 violoncelles et voix) pour la Salle des Départs de l'hôpital de Garches : hop, le lien: www.wnyc.org/shows/radiol...

(je crois que Niccolo prend deux "c". Sans certitudes, toutefois)