Quatuor Atrium: Borodine, Chostakovitch, Tchaïkovski

Entendu hier soir: un concert donné par le quatuor Atrium dans un programme russe. Bien que le concert soit organisé par le festival Jeunes talents, les musiciens de ce quatuor ne sont pas des lapereaux de quinze jours, car ils travaillent ensemble depuis 8 ans, ont déjà enregistré un premier disque et gagné une brochette de prix internationaux.

Le lieu d'abord: en plein air, dans la cour du très bel hôtel de Soubise. Le silence est assez étonnant pour un lieu au cœur de Paris, qui me fait penser à la cour aux Ernests du 45 rue d'Ulm, les arbres et les poissons en moins. Les murs renvoient assez bien le son, qui est tout de même moins enveloppant que dans une salle fermée. Et l'on a tout ce qui fait le charme d'un concert en plein air: les pinces à linge pour tenir les partitions, le cri aigu des martinets qui survolent la scène de loin, et même une cloche qui viendra d'une manière quasi providentielle renforcer l'intimité tragique du quatuor de Chostakovitch.

Le concert commence par le premier quatuor de Borodine, une pure merveille, d'un romantisme lyrique et expressif qui provoque chez les interprètes comme dans le public un irrépressible sentiment de joie. Dès les premières notes, je suis frappé par la concentration des artistes, l'intensité qu'ils donnent à chaque note, le bonheur visible qu'ils éprouvent à écouter leurs partenaires autant qu'à jouer. Osons le mot: ils jouent avec amour. Dès lors, les épisodes de ce quatuor s'enchaînent avec une fluidité parfaite.

Changement d'atmosphère avec le quatuor n°7 de Chostakovitch (1960) où le compositeur exprime ses pensées les plus intimes, sans se soucier d'être compris ou entendu. L'allegretto initial, avec une légèreté dansante un peu fausse, installe un sentiment de malaise. Le lento central, très dépouillé, aux couleurs élégiaques annonçant le 15e quatuor, ne fait souvent intervenir que deux instruments sur quatre. Très retenue, ressentie de l'intérieur, l'interprétation du quatuor Atrium dit beaucoup avec peu de gestes. La violence contenue dans les deux premiers mouvements explose dans le Finale, mais elle ne tardera pas à retomber, et le quatuor à se refermer sur le thème initial, en un mouvement circulaire.

Tchaïkovski enfin, pour son troisième quatuor. Bien qu'ayant souvent joué et entendu sa musique, et tout en reconnaissant sa qualité d'écriture, je ne puis m'empêcher de la trouver académique, prévisible, et son lyrisme trop conventionnel pour me toucher au plus profond. Le quatuor Atrium aurait presque pu me faire changer d'avis, notamment en jouant les figures d'accompagnement (Tchaïkovski sépare toujours nettement mélodie et accompagnement, trop nettement à mon goût) avec une telle intensité qu'elles deviennent quasi thématiques. Un superbe mouvement lent (Andante Funebre et doloroso, certainement une des plus belles pages de Tchaïkovski), un finale plein d'élan qui se conclut sur un mi bémol majeur triomphant comme il se doit.

Si vous souhaitez entendre cette belle formation, je vous invite à consulter leur agenda sur Internet qui, une fois n'est pas coutume, est bien tenu à jour.

Commentaires

1. Le lundi 7 juillet 2008, 16:44 par Jean-Brieux

Le festival européen des Jeunes Talents constitue en effet un moment agréable de la période estivale. Merci d'en parler. Je n'ai pas assisté à ce concert, mais à celui d'ouverture.