Devoyon, Murata: musique française pour deux pianos

Le journal de Papageno vous offre une exclusivité car le disque dont nous parlons aujourd'hui n'est pas encore disponible en France. Il comporte En blanc et noir de Debussy, Musique pour deux pianos de Merlet et en plat de résistance, les Visions de l'Amen de Messiaen, enregistrés au Japon par Pascal Devoyon et Rikako Murata pour le label Regulus.

Pasal Devoyon, Rikako Murata (musique pour deux pianos)

Autant l'avouer franchement, je ne suis pas un grand fanatique de la musique pour deux pianos en général. J'ai bien de la peine à y trouver une richesse de couleurs et de timbres qu'on trouve avec l'orchestre ou avec toute autre formation de musique de chambre. Les réductions d'œoeuvres orchestrales pour deux pianos (ou plus) sont en général à mourir d'ennui, et même les meilleurs pianistes ne son pas forcément à l'aise avec le jeu à deux qui demande un vrai travail de musique de chambre.

Ce qui m'a décidé pour ce disque, c'est un concert tout à fait passionnant qui comportait la première et la dernière des Visions de l'Amen. J'ai trouvé chez ces deux virtuoses un sens des nuances, de l'écoute, du timbre et une vraie complicité. De plus la musique de Messiaen est jouée ici avec un enthousiasme tout à fait communicatif. Détaillons un peu le programme:

  • En blanc et noir de Claude Debussy. Une musique assez sombre, aux accents inquiétants, écrite en 1916. L'écriture assez dépouillée (en particulier dans le mouvement central indiqué Lent, sombre) donne plus souvent l'impression d'écouter un seul piano que deux.
  • Musique pour deux pianos de Michel Merlet (1964). Le style de Merlet est assez difficile à définir, quoique aisément reconnaissable à l'oreille. Intégrant les acquis du vingtième siècle sans renier ceux des siècles précédents, son langage harmonique est complexe mais il offre suffisamment de repères pour éviter à l'auditeur de se perdre. Le Prélude commence comme une lente déploration qui sera brutalement interrompue par des rafales de triples croches, sans perdre son caractère élégiaque. Ce prélude se poursuit par un Allegro basé sur une série de 12 sons. Suivent un mouvement lent puis un Scherzo des plus énergiques. Je vous propose d'écouter le début de l'Andante:

  • Messiaen: Visions de l'Amen Il faudrait toute une série de billets pour parler de ce cycle, mais la musique de Messiaen d'une part se passe très bien d'explications, d'autre part a été abondamment commentée par d'autres. Je soulignerai simplement la cohérence, l'énergie et le bonheur visiblement communicatif des interprètes, qui ont surmonté les difficultés de cette partition touffue pour nous la faire entendre dans toutes ses couleurs splendides. Les Visions de l'Amen gravées par Pasal Devoyon et Rikako Murata n'ont pas vocation à remplacer les enregistrements historiques de Messian et Loriod, ni celui des sœoeurs Labèque supervisé par le compositeur. Mais elle témoigne du fait que ce texte est devenu un véritable classique, qui a gagné toute sa place dans le répertoire.

Commentaires

1. Le samedi 23 août 2008, 23:40 par [ Ben ]

Conclusion, le disque sans avoir spécialement vu de concert, vaut le coup ? Parfois on retrouve à l'écoute les moments que l'on a vécu en concert... et cela donne une toute nouvelle dimension à la musique, qui manque un peu si l'on n'a pas vécu le concert...

Cela dit Pascal Devoyon et Rikako Murata sont effectivement très bons ; j'ai pu les écouter sur quelques pièces du style espagnol, tout à fait remarquables !

2. Le dimanche 24 août 2008, 15:06 par Papageno

Difficile à dire, il faudrait que je fasse entendre le disque à quelqu'un d'autre pour répondre à cette question !!

Le disque par rapport au concert c'est comme la nourriture en boîte par rapport aux produits frais: évidemment c'est moins bien, mais ça peut être très bon quand même.