Trois grands cycles pour piano seul au XXème siècle

Le clavier bien tempéré de Jean-Sébastien Bach a toujours été une source de fascination et d'inspiration pour les compositeurs, surtout les compositeurs pianistes (ou organistes). Beethoven disait de ce double cycle de 48 préludes et fugues dans toutes les tonalités majeures et mineures: ça n'est pas un ruisseau, c'est un océan ! (Bach signifie ruisseau en Allemand). Chopin avait une pratique quotidienne de ces pièces, et il a écrit un cycle de 24 Préludes dans toutes les tonalités qui constitue peut-être, avec les Sonates, le meilleur de sa production. Et au vingtième siècle ?

L'âge d'or du piano, qui commence avec Beethoven (lequel avait anticipé dans ses sonates sur les possibilités futures de l'instrument), se poursuit avec les romantiques (Schumann, Chopin, Liszt, Brahms, Rachmaninoff) semble se terminer avec les feux d'artifice des impressionnistes (Debussy, Ravel). Avec la radio, puis le disque, le piano perd sa place d'instrument-roi, de centre obligé de toute la pratique musicale. Le regain d'intérêt pour les instruments anciens (clavecin puis pianoforte) l'affaiblit encore.

Pourtant certains compositeurs ont gardé l'envie d'écrire pour cet instrument, et c'est non pas un mais trois grands cycles comparables au clavier bien tempéré que je vais vous présenter.

Hindemith: Ludus tonalis

  • Hindemith: Ludus Tonalis (1942) Composé aux USA durant l'exil (il avait été chassé d'Allemagne par les nazis qui trouvaient sa musique enjuivée et décadente), ce cycle comporte douze fugues séparés par onze interludes. Le cycle commende par un prélude et se termine par un postlude qui est le miroir exact du prélude (renversement + rétrogradation). Conformément aux convictions esthétiques d'Hindemith, qui n'a jamais vraiment renié la tonalité, mais qui pensait qu'il fallait dépasser la distinction majeur / mineur, il y a 12 fugues et non 24. Toutes ces pièces sont normalement enchaînées, le tout couvrant une cinquantaine de minutes.

On en trouve plusieurs versions au disque, celle que je vous propose par John McCabe, possède de belles couleurs et évite toute aridité. Sur le même disque on trouve la suite 1922 qui regarde du côté du jazz (boston, ragtime, ...)

Messiaen vingt regards

  • Messiaen: Vingt regards sur l'enfant Jésus (1944) Pas de référence directe au clavier bien tempéré dans cette oeuvre, mais on y retrouve tout l'univers de Messiaen: chants d'oiseaux, harmonies basées sur les fameux modes à transpositions limitées, inspiration explicitement religieuse. Messian lui-même ayant pris la peine de rédiger une introduction très complète et d'émailler la partition de commentaires techniques et poétiques, si vous cherchez une analyse détaillée de l'oeuvre, le mieux à faire est de se procurer la partition (comme toutes les partitions du monde on la trouve chez di arezzo). Comme le dit le compositeur dans l'introduction, j'ai cherché ici un langage d'amour mystique, à la fois varié, puissant et tendre, parfois brutal, aux ordonnances multicolores.

Messiaen: vingt regards sur l'enfant Jésus (Béroff) Deux versions au moins sont à recommander au disque: celle d'Yvonne Loriod, épouse de Messiaen et dédicataire de l'oeuvre, chez Erato. Et celle de Michel Béroff, grand virtuose et très bon connaisseur de l'oeuvre de Messiaen. Mentionnons également celle de Roger Muraro, élève de Messiaen, qui a enregistré chez Accord une intégrale en 7 disques de l'oeuvre pour piano.

  • Chostakovich: Vingt-quatre préludes et fugues opus 87, pour piano (1950-1951) Ce cycle est très proche du clavier bien tempéré dans la forme et dans l'esprit (24 préludes et fugues sur tous les tons majeurs et mineurs). Seul un immense compositeur comme Chostakovich pouvait relever un tel défi, et le réaliser avec autant de rigueur dans la forme et de renouvellement dans l'inspiration.

Shostakovich par Tatiana Nikolaeva

Au disque, la version incoutournable est celle de Tatiana Nikolaeva (chez Melodiya, maintes fois ré-éditée), une pianiste et compositrice qui a créé l'oeuvre en 1952, et qui a également une spécialiste de Bach puisqu'elle a enregistré une excellente version du Clavier bien tempéré. Une bonne demi-douzaine de pianistes ont enregistré ce cycle dont certains très connus comme Vladimir Ashkenazy, Konstantin Scherbakov ou Keith Jarrett. On trouve même chez EMI un disque avec certains préludes et fugues joués par Chostakovich lui-même.

Commentaires

1. Le lundi 15 octobre 2007, 10:05 par Mr-Bark

'bach signifie ruisseau en allemand' -> j'ai du mal avcomprendre la ...;)

2. Le dimanche 3 février 2008, 14:15 par MBark

patrick, merci a voud pour cette image ! :)

3. Le mardi 3 février 2009, 19:59 par catwoman

merci pour l'artclle, si seulemment vous etiez un peu pluss precis dans votre analyse!!!

4. Le mardi 3 février 2009, 21:52 par Papageno

chère catwoman, vous trouverez des analyses plus détaillées par exemple dans le très bon "guide de la musique de piano" de F-R Tranchefort chez Fayard. Mon but n'était pas d'analyser mais juste de présenter très rapidement et d'établir un lien entre les 3 cycles.

5. Le mercredi 4 février 2009, 03:07 par catwoman

bonne continuation :)