Mendelssohn, Schubert, Brahms par Michèle Sharapan et ses amis

Hier soir au théâtre du Conservatoire d'Art Dramatique dans le 9ième arrondissement de Paris. Une plaque indique que c'est dans cette salle qu'eut lieu la création de la Symphonie Fantastique d'Hector Berlioz, ainsi que celle d'Harold en Italie, excusez du peu. Le théâtre a été rénové depuis mais je me demande tout de même comment sa scène a pu accueillir un orchestre au complet avec les 2 harpes, les cloches, la grosse caisse, les 2 tubas et les 4 bassons, et tutti quanti !

Quoi qu'il en soit cette salle est parfaitement adaptée au programme de trio avec piano et piano 4 mains proposé par Michèle Sharapan (piano), Thomas Gautier (violon), Seokwoo Yoon (violoncelle), et Grégory Ballesteros (piano). Avec de la musique romantique allemande (Mendelssohn, trio en ut mineur op 66), de la musique romantique allemande (Schubert, Divertimento à la hongroise D 818) et de la musique romantique allemande (Brahms, trio en si majeur op 8). Sans compter le bis, de la musique romantique allemande (Brahms, danse hongroise).

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Nonobstant ce flagrant manque d'orignalité dans le programme (nos lectrices savent combien à la rédaction du Jounal de Papageno, on aime les raretés, les chefs-d'oeuvres méconnus, le contemporain qui pique et qui gratte, les pastiches et les mélanges, bref, tout ce qui réveille les oreilles), je n'hésiterai pas à déclarer que j'ai passé un excellent moment. Quel beau concert ce fut !

On entend dès les premières notes qu'on a affaire à des musiciens confirmés et d'excellents chambristes, mais il y a quelque chose de plus. Quelque chose de magique dans l'air, qui circule entre les interprètes et le public. De l'amour. L'amour de la musique bien sûr (Brigitte François-Sappey dans son beau livre La Musique de l'Allemagne Romantique, nous rappelle avec raison qu'on ne trouvera jamais plus de pays ni de période historique où la musique ait été davantage chérie, célébrée et pratiquée par la société toute entière, poètes, écrivains ou banquiers), l'amour de tout le genre humain, et même davantage, car ce concert est organisé au profit d'un association (L214 Éthique et animaux) que je soutiens et qui prône un plus grand respect de tous les êtres animés qui partagent cette petite planète avec nous. Quoi qu'il en soit ce trio de Mendelssohn est un régal de bout en bout. Et le quatre-mains de Schubert qui suit n'est pas moins réjouissant. Je me surprends à penser que le piano à quatre mains est peut-être la forme de musique de chambre qui réclame l'osmose la plus étroite entre les musiciens, qui sont proches au point de partager le même instrument ! Même les membres d'un quatuor à cordes n'atteignent pas ce degré d'intimité. Et ce divertimento all'ungherese me fait complètement craquer, surtout le troisième mouvement.

A l'entracte quelques mots de Michèle Sharapan qui nous rappelle en deux phrases que si l'article L214 du Code Rural qui définit les animaux comme des êtres sensibles était réellement appliqué, il n'y aurait pas de corridas, ni de fourrure, ni d'élevages intensifs, ni de cirques ou de zoos. Puis on attaque le trio de Brahms. J'ai parfois l'impression d'être le seul être humain sur Terre à ne pas trop aimer la musique de Brahms, mais c'est pourtant le cas. J'ai toujours un peu d'étonnement en voyant les musiciens s'emparer avec passion de lignes mélodiques dans lesquelles je ne vois qu'un exercice de construction assez talentueux mais diablement académique. Et cet abus de tierces et de sixtes parallèles me reste sur l'estomac comme les 5 couches de crème d'une grosse part de Strudel. Cette petite réserve quant à l'oeuvre mise à part, je ne peux que reconnaître dans l'interprétation le même élan, la même chaleur, le enthousiame communicatif que dans le trio de Mendelssohn, et tout ça fait quand même drôlement du bien. Il me semble ausi que le public est plus attentif et chaleureux que d'habitude, même si je ne saurais dire combien il y a de militants et combien de mélomanes dans l'assistance. Les végétariens, plus sensibles que les autres au bien-être animal, le seraient-ils également à la musique ? Ce n'est pas impossible.

Après un petit bout de Danse hongroise arrangé pour piano 4 mains, violon et violoncelle en guise de bis, le concert se termine sur de chaleureux bravos. Et vous l'aurez compris, j'y ajoute les miens par écrit. Bravo, merci et à bientôt !