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dimanche 5 juillet 2015

Comment écrire une symphonie avec trois notes (remarques sur la Cinquième de Vaughan Williams)

La scène se passe à Londres en novembre 1937. Tandis qu'un brouillard épais et glacé recouvre la ville, dans l'ambiane feutrée et capitonnée du St Regent Composer's Club, le digne Sir Vaughan-Williams finissait un excellent whisky écossais en compagnie de son vieil ami David S, musicologue. Partie des sujets d'actualité, la conversation arriva sur la musique dodécaphonique:

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mercredi 10 juin 2015

Tour à Tour de Philippe Hurel à la maison de la Radio

Entendu le 5 juin dernier dans le très bel auditorium de la Maison de la Radio à Paris, Tour à Tour de Philippe Hurel, ambitieuse partition symphonique de 60 minutes présentée dans le cadre du festival Manifeste de l'IRCAM.

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lundi 16 février 2009

La fugue d'école: une antisèche en sept points

Comment écrire une fugue d'école ? Pour commencer on peut improviser un petit prélude:

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dimanche 15 février 2009

Toujours plus fort !!

S'il fallait résumer l'évolution de la musique occidentale depuis le moyen âge, il est probable que trois mots suffiraient: toujours plus fort !! Donnons quelques repères historiques:

  • Paris, le 15 août 1728. Marin Marais, musicien de la chambre du Roy, décède à l'âge de soixante-treize ans. C'était un des grands maîtres de la viole de gambe, et sans doute l'un des derniers. Il aura vu la viole progressivement remplacée dans la musique savante par un instrument criard au son agressif qu'on croyait réservé au danses du peuple: le violon. Lorsqu'il meurt, il le sait, il est déjà trop tard, l'aristocratique viole ne plaît plus qu'à quelques nostalgiques. Des poèmes satiriques moquent son embonpoint, ses soupirs asthmatiques et plaintifs. La famille tout entière des violes (dessus de viole, viole d'amour, taille, viole de gambe) est amenée à disparaître, sauf la contrebasse de viole qui a curieusement survécu dans l'orchestre symphonique.
  • Londres, 1768 Jean-Chrétien Bach connaît à Londres un grand succès avec des concerts donnés sur le fortepiano de Zumpe, un instrument où les cordes sont frappées par des marteaux et dont le son est plus puissant et projette mieux que le clavecin ou le clavicorde. Le principe a été inventé par le facteur italien Cristofori dans les années 1720, importé en Allemagne par Silbermann, dont les instruments ont été vivement critiqués par le père de Jean-Chrétien Bach (un certain Jean-Sébastien...). D'un prix abordable, les pianoforte carrés de Zumpe se vendent comme des petits pains à la classe moyenne anglaise. Les jours du clavecin sont comptés, il ne survivra pas au XVIIIe siècle.
  • Paris, 1821: un facteur d'instruments du nom d'Erard dépose le brevet du double échappement, une petite révolution dans le monde des instruments à clavier. L'invention d'Erard permet davantage de nuances (le pianissimo et le fortissimo s'ajoutent au piano-forte). Elle résout certains problèmes techniques comme la répétition rapide de la même note. Avec une table d'harmonie plus grande, la généralisation de la pédale qui permet de lever tous les étouffoirs d'un seul coup, des cordes plus grosses et plus longues, le piano moderne est né. Un enfant prodige du clavier sera chargé d'en faire la réclame: Franz Liszt. Lors des tournées dans toute l'Europe du célèbre virtuose, le facteur parisien mettra gratuitement un piano Erard à sa disposition. La presse parisienne ironise sur la furie lisztienne, qui casse corde et marteaux et chavire le public sous un déluge de triples croches. Mais Chopin, Brahms et les autres vont s'approprier l'instrument-roi de la seconde moitié du XIXe siècle, dont la puissance peut rivaliser avec l'orchestre. Le piano n'a cessé de devenir plus gros, plus lourd, plus puissant depuis 1840, au point de susciter réactions épidermiques et autres problèmes de voisinage. Qui a dit que la musique adoucissait les moeurs ?

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  • Vienne, 1846: Hector Berlioz, en tournée à Vienne, reçoit un accueil mitigé. Les Viennois, déjà très conservateurs à l'époque, s'ils ne peuvent que reconnaître le génie de Berlioz, trouvent sa Symphonie Fantastique et son Roméo et Juliette trop éloignés du modèle beethovénien. La marée débordante des violons, le rugissement des cuivres, la bombardement des percussions: c'est tellement moderne ! Dans ces mémoires Berlioz cite un échange avec le prince de Metternich (ambassadeur):
    • C'est vous, Monsieur, qui composez de la musique pour cinq cents musiciens ?
    • Pas toujours, Monseigneur, j'en fais quelquefois pour quatre cent cinquante.

Plus tard, Wagner, Malher et d'autres se chargeront de donner à l'orchestre romantique des dimensions toujours plus épiques.

  • La même année, Adolphe Sax dépose le brevet de son saxophone, un instrument hybride avec un bec de clarinette sur un corps de cuivre, au son étrange et doux, cependant bien plus puissant que la clarinette. La tendance générale pour tous les instruments est un son toujours plus puissant. C'est vrai notamment du roi des instruments, l'orgue, qui grâce aux débuts de l'électricité et de la transmission pneumatique, peut atteindre une taille gigantesque. Même les violons sont équipés de cordes en métal, plus tendues, au son plus agressif.
  • Cette course à la puissance orchestrale atteint un sommet au début des années 1910, avec des oeuvres comme Elektra (Richard Strauss, 1911), le Sacre du Printemps (Strawinski, 1913), Gurre-Lieder (Schoenberg, 1913). Par réaction, l'orchestre symphonique, trop massif mais aussi trop figé dans ses traditions, sera boudé par de nombreux compositeurs d'avant-garde au XXè siècle.
  • Mais le danger, pour nos oreilles, vient d'ailleurs: en 1928 Maurice Martenot présente la première version de l'onde Martenot, le premier instrument amplifié électriquement, ancêtre de tous les synthétiseurs:
  • Les premiers prototypes de guitare électrique datent également des années 1920. Mais ces vénérables instruments utilisent des amplificateurs à lampe qui possèdent de belles qualités musicales mais dont la puissance est limitée. C'est à partir des années 1960, avec la généralisation des amplificateurs à transistors, qu'on pourra vraiment y aller à fond les basses. Le rêve (ou plutôt le cauchemar) de Jules Vernes dans son roman Paris au XXe siècle, écrit en 1864 et jamais publié de son vivant, est devenu réalité:

enfin, il arriva au milieu d'un assourdissement épouvantable à une immense salle dans laquelle dix mille personnes pouvaient tenir à l'aise, et sur le fronton, on lisait ces mots en lettres de flamme:

Concert électrique

Oui ! Concert électrique ! Et quels instruments ! D'après un procédé hongrois, deux cents pianos mis en communication les uns avec les autres, au moyen d'un courant électrique, jouaient ensemble sous la main d'un seul artiste ! Un piano de la force de deux cents pianos.

Outre le clin d'oeil à Liszt (le procédé hongrois) c'est tout de même drôlement bien vu. Jules Vernes, ce remarquable observateur de sont époque et de tout ce qu'elle contenait en germe, n'avait pas seulement prédit que l'homme irait sur la Lune, mais aussi l'avènement du hard rock et de la techno.

  • La techno, a déclaré un chanteur de variétés françaises, ne rentre pas dans le corps par les oreilles mais par l'anus. Il ne croyait pas si bien dire ! Les fréquences plus basses qui sont celles qu'on amplifie le plus (car notre oreille, plus sensible dans les fréquences aiguës ne le supporterait pas autrement) peuvent faire résonner l'oreille interne après avoir fait vibrer notre corps, sans passer par les pavillons ni par les tympans. La preuve ? On organise aujourd'hui des Deaf Rave Parties destinées à un public sourd et malentendant. D'ailleurs vous êtes bienvenus à ce raves même si vous n'êtes pas sourds; de toute façon vous ne tarderez pas à le devenir !

lundi 22 décembre 2008

La musique, "attribut de reproduction spécifique" ?

A quoi sert la musique ? Si je n'écoutais que mon coeur, je répondrais: à quoi sert le reste ? et nous en resterions là. La question est plutôt: à quoi sert la musique pour ceux qui ne sont pas monomaniaques comme l'auteur de ce journal ?

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dimanche 30 novembre 2008

Au fond de l'Inconnu pour trouver du nouveau !

Le critère principal, sinon unique, pour évaluer les compositeurs aujourd'hui est la nouveauté. Le plus beau compliment qu'on puisse leur faire est d'être innovants, audacieux. Lorsqu'on qualifie leur musique de littéralement inouïe, il faut entendre: vraiment bonne. Même chez les maîtres des siècle précédents, Strawinski, Webern ou Varèse, on salue la modernité avant tout, avec des formules oxymoriques comme une modernité qui dure ou un classique de l'avant-garde.

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samedi 5 avril 2008

Du progressisme en musique

Je rebondis sur une question posée par Eric qui s'étonnait d'apprécier Thierry Escaich alors qu'il reste peu sensible à la musique de Ravel:

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mardi 11 mars 2008

Musique contemporaine et complexité de Kolmogorov

Voici un article plutôt long et théorique et je m'en excuse par avance. Parmi les concepts fondamentaux de la science informatique figure la complexité de Kolmogorov. C'est une mesure qui indique, étant donné une série de 0 et de 1, comment on peut la compresser, c'est à dire la décrire par un programme informatique plus court. Lorsqu'une série de 0 et de 1 n'admet pas de description plus courte qu'elle-même, on dit qu'elle est aléatoire au sens de Kolmogorov. Ce qui est amusant avec cette définition de l'aléatoire est qu'elle ne fait intervenir aucune notion de probabilité. La complexité de Kolmogorov intervient dans la théorie de la calculabilité, mais aussi en cryptographie, en traitement du signal, en compression de données.

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vendredi 22 février 2008

Des vibrations dans l'air

Si l'on y réfléchit bien, le métier du musicien consiste à produire des vibrations dans l'air. Il est vraiment difficile d'imaginer une occupation plus vaine et plus futile. Alors qu'il y a des médecins et des pompiers qui sauvent des vies, des ingénieurs, des ouvriers, des professeurs, des notaires et des banquiers qui s'occupent de choses sérieuses, le violoniste ne s'occupe que de perfectionner son vibrato.

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