Entendu sur France Musique mardi dernier, dans la matinale de Christophe Bourseiller, l'interview de Lydie Salvaye qui a sorti un nouveau bouquin, Hymne, où elle détaille les raisons de son amour inconditionnel pour le guitariste Jimmy Hendricks. Elle évoque longuement le mythique solo de guitare de Woodstock (c'était en 1969, en pleine guerre du Vietnam, et au sommet du mouvement hippie, petit rappel pour les plus jeunes lecteurs de ce blog). Ce solo est une improvisation sur le Star Sprangler Banner (l'hymne américain). On y trouve notamment des bruits évoquant la chute de bombes, les sirènes ou les cris des victimes. Fort heureusement grâce aux sites de partage de vidéo, on peut facilement le réécouter de nos jours:
Pour illustrer musicalement les savantes considérations politiques et musicologiques de Lydie Salvaye, que croyez-vous que nous entendîmes ? Du Hendricks ? Que nenni ! Nous eûmes droit à Rachmaninoff, Gossec, Gottschalk, et aussi à une curieuse version pour orchestre bourrée de fautes d'harmonie dont j'appris par la même occasion qu'elle est due à Strawinsky et qu'elle fit scandale dans les années 1940. De fait avec une oreille exercée on entend bien un peu de guitare électrique mais elle est planquée derrière la voix de l'écrivaine lors de sa première intervention (ce que la vidéo permet de vérifier). Autrement dit le solo de guitare qui fait le sujet principal du bouquin se trouve relégué au rang de fond sonore dosé au minimum par les ingé son de Radio France. N'est-ce pas curieux tout de même ?
Lydie Salvayre - Musique matin par francemusique
Si France Musique autorise la diffusion de Strawinsky, qui fit scandale en son temps, pourquoi s'interdit-elle celle de Hendricks ? Il satisfait même au critère habituel (à savoir qu'il est mort, ce qui est toujours de bon aloi pour un compositeur ou même de nos jours pour un interprète). Est-ce le présentateur qui souffre de classiquite aigüe ? Même pas !! Christophe Bourseiller, qui me donne l'impression d'être tout à fait charmant et cultivé, est en plus de cela ouvert d'esprit, car il diffuse tous les jours quelques minutes de musique contemporaine (ce mardi-là c'était une pièce pour violoncelle seul de Sandor Veress par ailleurs remarquable).
Alors, quoi ? Le rock est-il par nature exclu de la musique jugée digne d'intérêt et d'attention ? Même à titre documentaire, on ne peut pas en passer 3 minutes sur France Musique (laquelle arborait fièrement un "s" à Musiques dans son nom il y a quelques années) ? Les improvisations d'Hendricks auraient-elle par nature, fatalement, moins d'intérêt que celles de Karol Beffa, JF Zygel ou Thierry Escaich ?
On peut bien sûr être moyennement (voire pas du tout...) convaincu par la comparaison que Lydie Salvaye établit entre Hendricks et Beethoven, mais encore faut-t-il pour cela avoir entendu les deux. Entendre une demi-heure de discours dithyrambique sur Hendricks et pas une seconde de musique c'est tout simplement ahurissant.
Au programme, de la musique française d'aujourd'hui:
Au cœur du livre se trouve l'hypothèse de Riemann, un des
Pour ne pas se perdre dans un propos si vaste, Frédéric Lainé choisi un découpage chronologique d'abord (l'époque baroque 1600-1750, l'émergence 1750-1830, l'alto romantique 1830-1870, vers la reconnaissance 1870-1918, vers l'autonomie de 1918 à nos jours), thématique ensuite. Chaque partie qui couvre une cinquantaine de page est donc divisée en tranches consacrées à la lutherie, au répertoire pour orchestre, à la musique de chambre, aux interprètes, etc. Le tout complété par un Glossaire, une Bibliographie et un Index.
Pour plus de détails, je vous renvoie au
C'est ce poème, lu par son auteure que j'ai choisi comme point de départ pour ma toute première pièce de musique électroacoustique. On y trouve bien sûr des bruits d'eau; pluie, cascades, gouttes, mais aussi quelques sons de piano, qui ont été retravaillés pour s'harmoniser avec les gouttes. Avec les bruits d'eau on dispose d'une palette assez riche où l'on des sons harmoniques comme les gouttes aussi bien
que la cascade qui se rapproche du bruit blanc (saturation de toutes les
fréquences) et tous les intermédiaires. Au-delà de l'aspect technique - enregistrer, nettoyer, filtrer, mixer les sons - l'une des difficultés est de dépasser l'aspect anecdotique ou descriptif des sons pour leur donner une qualité, une présence, une signification, un rythme véritablement musicaux. Pas sûr que j'ai vraiment réussi dans cette pièce qui ne me satisfait qu'à moitié. Elle possède néanmoins le grand avantage de durer 2 minutes seulement, et de se terminer donc avant qu'on en soit lassé.
ien sûr ! Il suffit de regarder
le public du Théâtre des Champs-Élysées ou de la Folles Journée
de Nantes pour s'en persuader. Mais pourquoi ? C'est tout
simple : en vieillissant l'oreille baisse. La musique devient
progressivement moins riche en couleurs (à cause des fréquence
aigües). Dans ces conditions il est beaucoup plus confortable de
ré-écouter la musique qu'on connaît déjà, car la mémoire
reconstitue ce qu'on n'entend plus que partiellement. Et puis le
classique c'est assez prévisible, c'est toujours la même chose :
tonique, dominante, ré-exposition, cadence, coda, saluts,
applaudissements, taxi, une camomille et puis au lit ! Alors
que tout fout le camp, tout se détraque ma bonne dame, les jeunes
ne respectent plus rien, le rituel immuable bien rôdé du concert
classique est rassurant. Plus on vieillit, moins on entend bien, et
plus on apprécie Vivaldi sur instruments d'époque.

On l'a déjà dit, le bourgeois c'est
comme le cochon, plus ça devient vieux, plus devient amateur de
classique. Mais le conservatisme n'est pas que la tendance politique
dominante dans le public : c'est aussi une maladie qui touche
les artistes eux-mêmes dans leur cœur de leur travail. Il y a la
formation très standardisée à laquelle on les soumet alors qu'ils
sont trop jeunes pour avoir développé une véritable personnalité.
Il y a le respect maniaque de la partition qui atteint une
dimension fétichiste et idolâtre (on oublie ainsi que la partition
n'est qu'un medium fort imparfait et incomplet de
communication entre le compositeur et les interprètes, qui repose
sur beaucoup de conventions non écrites). Il y a les versions
discographiques « de référence » auxquels ils seront
comparés qu'ils ne veuillent ou non. Il y a le programme des
concours internationaux où l'on retrouve toujours les même 4 ou 5
concertos pour violon, et qui semblent destinés, ces concours, à
produire des clones plutôt que des artistes. Il y a les agents et
les directeurs de salle qui préfèrent ce qui se vend bien, c'est à
dire les œuvres les plus connues et rebattues du répertoire. En
bref, depuis l'école de musique première année jusqu'à la scène
de la philharmonie de Vienne, c'est lavage de cerveau à tous les
étages !
Un bon compositeur est un compositeur mort, c'est tout à fait
inutile de revenir là-dessus. Mais la calcification de la musique
classique va bien plus loin que ça : l'industrie du disque et
le fétichisme du top 100 conduisent de plus en plus les interprètes
disparus (Maria Callas, Glenn Gould, …) à charmer nos oreilles.
Certains proposent même de recréer le « toucher » des
pianistes disparus d'après leurs enregistrements, pour programmer
une sorte de piano mécanique, afin produire des « concerts »
de zombies avec Rubinstein, Gilels, Cziffra... Amis
nécrophiles, bonsoir !

